Ainsi naquit Anabeth Hill. Née au sein d'une famille aisée, dans la banlieue de Londres, elle eut à ses côtés des parents qui s'occupaient d'elle d'une façon extrêmement prononcée, comme si elle était une poupée de cire qui était incapable de bouger ou de résoudre ses problèmes.
Ils l'exaspéraient, et elle ne supporta pas longtemps de continuer à vivre parmi eux, et c'est ainsi qu'elle fut mise en pensionnat.
Ses parents obéissaient au doigt et à l'œil de leur enfant, et unique enfant -ah! le malheur de ne plus pouvoir concevoir!- qui recevait tout ce qu'il souhaitait, et bien qu’elle-même n’aimait pas être trop gâtée, elle usait à merveille de son influence. Bien que légèrement à contrecœur, ils la placèrent suite à sa demande dans un établissement ou elle passa une partie importante de son enfance, de 7 à 15 ans.
Dans ce pensionnat, elle réussit à devenir l'ombre qu'elle avait souhaité devenir. Ses petites manies d'espionnage naquirent là-bas et elle les emportait partout où elle allait.

L'amitié. Ce contexte, elle l'avait manipulé à la perfection autour de ses 10 ans, ou elle savait plaire. Les deux années qui suivirent cet anniversaire étaient rythmées par la fréquence à laquelle les élèves devenaient des pantins se croyants ses amis. Elle leur ordonnait telles ou telles choses, et eux suivaient ses ordres. Mais deux ans plus tard, elle s'en lassa et son influence s'éteignit tout aussi vite qu'elle naquit. Les gens finirent par l’oublier, et elle redevint une ombre.

Un incident important et décisif se produisit autour de ses 15 ans. Elle avait, comme qui dirait, eu un faible pour un garçon un peu plus grand qu’elle, d’environ trois ans. Il était grand, avait de magnifiques cheveux bouclés et une peau laiteuse. C’était un sentiment nouveau pour elle, et Anabeth ne supportait pas d’être aussi sensible à tout ce que ce garçon faisait ou disait. En réalité, elle adorait le regarder longuement, cachée derrière un rideau ou dans un placard, et écouter sa voix qu’elle trouvait magnifique. Et un jour, elle alla le voir. Anabeth déteste franchement devoir comparaitre ouvertement vis-à-vis de ses émotions devant les autres. Mais c’était trop long à attendre, elle ne pouvait plus se contenter de le regarder de loin. Elle alla lui parler. Et elle prit un râteau monumental. Elle lui avait dit qu’elle le trouvait très beau et qu’elle aimait sa voix, il lui avait répondu qu’il avait déjà une copine et que de toute façon, Anabeth était trop petite pour lui.
Cette dernière était dégoutée. Affreusement triste. En colère. Jalouse.
Elle demanda aussitôt à ses parents de l’enlever de cette école. Elle quitta avec quelques regrets son lit, qui l’avait porté de nombreuses années, et retourna chez elle. La maison lui restait familière, elle y passait le dimanche, mais le pensionnat lui manquerait énormément.
Et puis elle se décida à retrouver cette jeune fille.
Celle qui occupait la place qu'elle convoitait dans le cœur du garçon.
Elle voulait la priver de ce qu'elle ne pouvait pas obtenir.
Elle la trouva, et ce fut simplissime. Elle fit simplement le tour des sites avant de trouver le jeune homme, puis la jeune femme. Les pares-feux des réseaux étaient à la limite faits pour être passés et son adresse IP révélait son domicile.
Une nuit, alors qu'elle fit mine d'aller se coucher, et fermant comme chaque soir la porte de sa chambre à clef, elle sortit par la fenêtre. Anabeth traversa ensuite la propriété avant d'arriver dans son village. Vêtu d'un long imperméable foncé, elle fila rapidement à travers les ruelles et les avenues, et se retrouva devant une bâtisse. La maison était plutôt grande, l'intérieur obscur sauf dans une pièce à l'étage, qu'elle identifia comme la chambre des parents.
Telle une ombre dans la nuit, elle sauta par-dessus la clôture de la propriété et s'engagea dans un immense jardin se rapprochant plus du boisé. Faisant le tour de la maison, elle arriva devant une fenêtre, et de sa lampe torche, elle éclaira l'intérieur. C'était une salle de jeux qui s'offrait à elle. De son sac, elle extirpa un marteau et donna un coup sec dans la vitre. Elle se brisa en gros morceaux avant de tomber sur la moquette de la pièce, qui étouffa le bruit.
Précautionneusement, elle passa son bras à travers le trou et ouvrit la poignée le plus lentement possible. Elle franchit l'encadrement et se retrouva dans la maison. L'adrénaline bouillait dans son corps.
Une nouvelle fois, elle ouvrir son sac pour en sortir une boîte d'allumettes. Elle fit glisser le petit compartiment pour en retirer une, qu'elle fit rouler contre ses doigts. Puis décidée, elle la gratta contre la boîte et la jeta sur la moquette sèche.
Rapidement, le feu se propagea que les fils du revêtement et elle sortit par l'endroit où elle était entrée, tout aussi facilement.
Elle contempla un instant les flammes qui dévoraient désormais une commode avant de s'enfuir. Dans la nuit.

Le lendemain matin, le père d'Anabeth laissa le journal sur la table avant de partir travailler. La jeune fille échappa de peu aux bisous baveux que lui réservait son père en se cachant dans un placard, et dès qu’il fut parti, s'empara rapidement du journal avant que sa mère ne le jette. Elle remonta dans sa chambre, située au deuxième étage, et s’installa sur son fauteuil pour lire.


Article du journal local
La maison de famille de Mr. *** brûle dans des circonstances mystérieuses. Aucun des membres de la famille et des domestiques présents cette nuit-là n'en ressort vivant. On soupçonne un feu accidentel ou un assassinat commandité par un ennemi financier du père de la famille. L’enquête est toujours en cours.


La jeune fille jeta le journal dans la corbeille et sourit.

Finissant sa scolarité avec succès, la jeune Anabeth entra dans l’Université réputée de Cambridge et y vit depuis déjà 3 ans. Elle s’apprête à recevoir son diplôme dans très peu de temps, ses études étant poussée dans la littérature. Elle travaille déjà dans une petite librairie alentours et compte ouvrir sa propre boutique après l’obtention de son diplôme.
Mais la jeune fille est attirée par les conférences données par Sherlock Holmes et John Watson, un détective londonien et son assistant. Après tout, cela fait longtemps qu’elle suit le blog de ce dernier.